Kime
-
Ecrit par Nietzsche entre 1882 et 1885 Ainsi parlait Zarathoustra est l'une des oeuvres majeures de la littérature allemande et l'une des oeuvres majeures de l'histoire de la philosophie.
Sous une forme poétique qui en fait un chef d'oeuvre littéraire mais qui n'a pas facilité toujours l'accès à sa pensée profonde et qui a suscité bien des malentendus Nietzche y réalise une mise en place de tous les grands thèmes de sa philosophie. Il y montre que l'humanité est menacée de découragement et du pire laisser-aller du fait que s'est perdue la foi en Dieu, foi qui constituait depuis des millénaires le socle de la civilisation occidentale.
Il explique comment, pour éviter ce double danger l'homme doit se faire " surhomme ", c'est à dire remplacer Dieu dans son rôle de fondement de la morale et de toute la civilisation, et comment cette nouvelle morale et cette nouvelle civilisation impliquent une nouvelle conception du monde, une nouvelle métaphysique. Il examine enfin, sans illusion mais sans se décourager, la manière dont la civilisation contemporaine - contemporaine à Nietzsche, mais aussi contemporaine à ses lecteurs d'aujourd'hui - est en mesure d'écouter son message.
-
Vieillir explore les pertes, les écartements et les disruptions d'avec soi, le monde, les choses et les autres qui accompagnent le vieillissement comme chaotisation de l'expérience, toujours déjouée d'elle-même à mesure que l'âge s'avance. Le livre décrit le voyage nocturne qu'est, selon Chateaubriand, le vieillir, en en relatant les petits faits en gestes, les aventures quotidiennes, les micro-expériences et les méditations qu'il suscite et provoque. La mémoire et l'oubli, les réminiscences de l'enfance et du passé, l'altération des corps et des existences, l'écriture du vieillir comme syntaxe de la déprise, de la syncope et de la chute scandent ce texte fragmenté, et sa langue, philosophique et poétique à la fois, constamment ouvert, au-delà de l'inquiétude et de l'angoisse, sur la finitude et la mort dans sa possibilité d'impossible, sa certitude et l'exil définitif qu'à son heure elle viendra signifier.
-
A travers le judaïsme : Buber, Levinas, Simone Weil
Jean-Marc Ghitti
- Kime
- 15 Novembre 2024
- 9782380721522
Ce travail part d'une généalogie du sionisme suscitée par les doutes que fait naître en nous la guerre au Proche-Orient. Il étudie sa naissance chez Herzl, son interprétation par Buber, ainsi que son dévoiement actuel (première partie). Au-delà du sionisme, il est une apologie du judaïsme de la diaspora, étudié à travers Levinas et ses contradictions (deuxième partie). Enfin, il envisage le judaïsme assimilé, à travers la figure moins attendue et très paradoxale de Simone Weil, ici traitée comme une figure du judaïsme (troisième partie).
Au fil de ces trois études, certains concepts sont élaborés pour éclairer des questions qui vont au-delà du judaïsme : le territoire, la guerre, la relation entre État et nation, l'identité et l'impolitique. Ce sont ces concepts qui sont rassemblés en cohérence dans la conclusion (quatrième partie).
Il ne s'agit pas d'une étude strictement universitaire, bien que la pensée des trois philosophes de référence soient exposée et interprétée de manière comparative. Il ne s'agit pas non plus d'un essai militant, bien que des positions claires soient prises sur des sujets sensibles. Le texte est plutôt une tentative pour modifier les catégories idéologiques et mentales par lesquelles nous avons l'habitude d'approcher les problèmes ici abordés.
Après un travail d'orientation écologique sur l'aménagement du territoire dans un texte à paraître, qui poursuit ma réflexion philosophique sur les lieux, j'ai été interpellé par la guerre au Proche-Orient et j'ai voulu éclaircir la question du territoire à travers le sionisme. Resituant celui-ci dans l'histoire du judaïsme, j'ai été amené à donner une nouvelle interprétation de l'oeuvre de Simone Weil à partir de sa relation complexe à ses origines juives. Le positionnement de cette philosophe, à qui j'ai précédemment consacré un ouvrage (2021), s'est éclairé différemment à partir d'une comparaison que j'ai tenté d'établir entre ses écrits et ceux de Buber et de Levinas. Mais, ce que j'ai cherché, à travers ces trois philosophes et l'image qu'ils donnent du judaïsme, c'est l'approfondissement du concept d'impolitique que j'avais introduit dans mon dernier essai publié (2023). L'impolitique est ici présentée comme une réponse possible à la territorialisation de la politique, aux guerres qui en résultent et au règne géopolitique du modèle des États-nations. -
Sommaire : Virginie Caruana, Michel Henry, Entretien avec Michel Henry / Bruno Gnassounou, Les limites du Devonshire ou pourquoi la métaphysique doit être prise au sérieux / Jean-Pierre Cotten, L´« expérience » de la chair chez le dernier Merleau-Ponty / Jean-François Mattéi, Les deux souches de la métaphysique chez Aristote et Platon / Dominique Grass, Dialectique historiciste et théorie du prolétariat / Viviane Ventrin, La généalogie de l´obscurcissement / Louis Ucciani, Schopenhauer ou l´inévitable métaphysique
-
Terre et déterritorialisation : Problématiques contemporaines à partir de l'oeuvre de Gilles Deleuze
Philippe Mengué
- Kime
- 18 Avril 2025
- 9782380721744
L'Occident, la culture euro-américaine, est sur sa fin. C'est ce qu'on dit. En maints et importants endroits. Il se défait sous tous ses aspects, économique (chaos commercial et financier due au néo-libéralisme mondial) politique (crise de la démocratie dans ses fondements) civilisationnel (absence de relève de sens).
Ce n'est pas faux, mais ce n'est ni central ni inéluctable. Il y a des raisons de croire encore à ce monde, aux puissances positives d'innovation, d'invention, de création qui sont toujours présentes, immanentes à notre époque, à l'Occident lui-même.
Mais ces dernières se trouvent présentement étouffées faute de reconnaître, la positivité des puissances de territorialisation. Le combat est avant tout philosophique, ontologique. L'Europe spirituelle doit s'émanciper du traitement dévalorisant qu'elle réserve systématiquement, depuis la Renaissance, au repos, à la territorialisation, à la Terre, en faveur du mouvement du nouveau, de la déterritorialisation.
L'oeuvre de Deleuze, est au centre de ces questions.
La lecture proposée, qui se veut non pas critique, mais en complicité de tension avec elle, dégage les principes philosophiques, orientés vers la Terre, capables de fonder une résistance nouvelle à la dévastation profonde du monde présent. -
Nouvelles méditations métaphysiques : Les existences imaginaires
Jean-Clet Martin
- Kime
- Bifurcations
- 22 Janvier 2025
- 9782380721614
Pour Descartes la réalité vaut mieux que nos rêves trop mal enchaînés, incapables dit-il d'adopter le cours d'une chaine cohérente. Ces « Nouvelles méditations métaphysiques » proposent l'hypothèse inverse. C'est le réel qui se montre plus absurde et plus illusoire que la moindre scène onirique. On peut compter ainsi sur le rêve pour une association créatrice des choses de l'avenir non moins que du passé. Un agencement sans doute plus courageux que l'ordre des raisons. Aussi, les vécus que la phénoménologie borne aux dimensions de la chair, ne sont eux-mêmes jamais exempts de surprises. D'où cette rectification patiente de L'imaginaire sartrien, lecteur de Descartes, cette enquête vers des sources aussi ensorcelées que les « Expériences d'un psychiste », de William James, ou les intrigantes recherches de Taine, les rêveries de Stevenson, voire les fantômes de Stanislas Lem dans une inversion étonnante du cartésianisme. Une explosion généralisée de l'opinion selon laquelle ne nous attendrait « rien de nouveau sous le soleil ». Les spectres et les revenants veillent de nuit pour dérouter les chemins de l'Être..
-
La plus haute solitude : La personne humaine selon Duns Scot
François Loiret
- Kime
- 18 Avril 2025
- 9782380721706
Cet ouvrage est la première étude portant exclusivement sur la personne humaine selon Duns Scot. Il s'attache à expliciter l'expression apparemment énigmatique par laquelle le théologien écossais caractérise la personne humaine : ultima solitudo. À rebours des interprétations négatives qui, depuis le siècle dernier, ont voulu voir dans cette expression la naissance de l'individualisme moderne, de l'homme moderne affirmant son indépendance en se clôturant sur soi et en se fermant à toute transcendance, il montre que l'ultima solitudo est éminemment positive puisqu'elle est la plus haute indépendance, celle d'une personne humaine qui est une volonté autodéterminée. À ce titre, il examine comment ce penseur a répondu au défi posé par l'introduction au XIIIe siècle d'une pensée qui ignorait tout de la personne, de la volonté libre, de la décision et du libre choix, celle d'Aristote, et comment cette réponse a conduit à l'élaboration d'une morale de la liberté irréductible à l'éthique, c'est-à-dire à la théorie du caractère élaborée par les Grecs qui s'avère incompatible avec la volonté libre. Aussi Duns Scot nous apprend-il non seulement qu'être une personne humaine n'est pas être un individu humain, mais aussi qu'une personne humaine n'est en rien réductible à un caractère équipé de vertus.
-
Vivre dans un monde numérisé : Bernard Stiegler et l'écologie de l'esprit
Fred Poché
- Kime
- Philosophie En Cours
- 17 Mai 2024
- 9782380721461
Depuis toujours, les sociétés humaines vivent des mutations. Au fil des siècles se développent, en effet, des outils propres à changer les relations sociales, à transformer les interactions. Mais celles que nous voyons émerger aujourd'hui se révèlent profondes, radicales et irréversibles. Elles captent notre attention et changent nos manières de vivre, de nous rencontrer ou de nous rapporter à la réalité. Nous vivons, ainsi, dans un monde marqué par un processus d'accélération technologique vertigineux. Les objets qui, dorénavant, accompagnent chaque instant de notre vie (ordinateurs, mobiles, tablettes, robots) altèrent ou modifient radicalement les catégories avec lesquelles nous pensions et agissions jusque-là?: le temps, l'espace, le pouvoir, la vérité, la communication, les identifications... Depuis seulement quelques décennies, la numérisation de notre univers sociétal engendre une explosion combinatoire provoquant ce que certains appellent une disruption. Celle-ci bouleverse les cadres d'à peu près tous les domaines et remet en question la puissance publique. Face à ce monde aux multiples transformations, la pensée du philosophe Bernard Stiegler nous offre des clés essentielles pour développer une posture critique. Elle donne au citoyen des outils propres à sortir des inclinations à la fascination autant que du penchant à la technophobie. Si ce monde numérisé étend sa toile sur toutes les ramifications de nos existences, il convient, alors, de l'appréhender en ne lâchant jamais les questions de la finalité et du sens du vivre ensemble.
-
Depuis quelques décennies, le féminisme dominant en Occident a oublié sa mission qui était la sienne depuis le XIXe siècle, l'obtention de l'égalité entre les femmes et les hommes au profit d'un militantisme qui, indifférent au sort tragique des centaines de millions de femmes à travers le monde, a débouché, via une théorie du genre qui a effectué sa jonction avec le transhumanisme, sur une radicale remise en question de l'être-femme lui-même. Dans l'oubli ou l'ignorance de l'histoire réelle des femmes, « domination masculine », « patriarcat », « misogynie » sont devenus des stéréotypes visant à rendre impossible tout travail critique.
Cet essai, où la philosophie croise l'histoire, la sociologie, la psychologie et la psychanalyse, se présente comme la critique radicale d'une dérive et d'une impasse qui ne font qu'isoler davantage l'Occident du reste du monde et le rendre odieux à ses yeux. -
Les cahiers noirs de Heidegger : un guide de lecture des Réflexions
Etienne Pinat
- Kime
- 16 Février 2024
- 9782380721324
En 2014 parurent en allemand les volumes 94, 95 et 96 des oeuvres complètes de Martin Heidegger édités par Peter Trawny, qui donnaient à lire pour la première fois quatorze des cahiers noirs, ces carnets à couverture de moleskine noirs dans lesquels Heidegger, à partir de 1932, consignait les pensées qui lui venaient à la volée. Dès la fin 2013 avaient commencé à circuler des extraits contenant des propos antisémites, et l'éditeur des volumes accompagnait leur parution d'un essai de son cru portant sur ces extraits, livre rapidement traduit en français. S'en suivit une large polémique à ce propos dans la presse internationale qui éclipsa tout autre aspect du contenu des cahiers noirs.
Etienne Pinat, spécialiste de la pensée de la pensée de Heidegger, se propose d'introduire le lecteur francophone à la lecture de ces trois volumes, intitulés Réflexions, en repartant de la polémique sur l'antisémitisme afin de statuer sur cet antisémitisme heideggérien. Il s'efforce de monter que ces passages antisémites ont éclipsé bien d'autres aspects intéressants de ces cahiers, et au premier chef l'explication de Heidegger avec le nazisme, et avec l'erreur que constitue à ses yeux son engagement de 1933-34. S'y révèle le développement progressif d'un véritable antinazisme heideggérien à partir de 1934, puis l'apparition de propos antisémites à partir de 1938, cet antisémitisme n'étant alors pas celui du nazisme, de sorte qu'il faut en penser la spécificité. -
Georges Bataille. L'expérience et la pensée : Philosophies et rhétoriques de l'excès
Olivier Capparos
- Kime
- 14 Février 2025
- 9782380721645
Dans le « théâtre » de Georges Bataille, le rideau se lève sur une scène peu éclairée, livrée aux expériences-limites de la pensée, des voix, du corps, des affects et attracts premiers (désir, joie, effroi...) Le théâtre se joue de ses contradictions internes, revendiquant même jusqu'à la dissolution des corps, du langage.
Cet essai propose de confronter les approches batailliennes de la souveraineté et de l'extase à d'autres traditions philosophiques et mystiques. À ce jeu d'ombres et d'indices luminescents participent Maître Eckhart, N. de Cues, G. W. F. Hegel, E. Husserl, saint Anselme de Cantorbery, F. Nietzsche, F. von Baader, P. Klossowski, S. Freud, le bouddhisme tibétain et le zen.
Là où le néant et la dissolution semblent l'emporter, une « philosophie de la lumière » se dégage et s'exprime. Le « style » d'une philosophie de la lumière privilégie une logique des analogies et des correspondances qui permettra peut-être de tisser un langage neuf, linguistique et figural, transgressant les dialectiques bien construites.
Georges Bataille, tout en renforçant la contestation de toute « servitude dogmatique », prône un renouvellement de plusieurs voies poétiques et spirituelles en quête de l'ineffable. -
Portrait du philosophe en grand vivant. Jean-Luc Nancy
André Hirt
- Kime
- 13 Septembre 2024
- 9782380721478
Penser à mort la vie, quelle qu'elle soit, partout, solitaire comme partagée, dans ses poussées d'énergie et de sexualité, de la veille au sommeil et au rêve. Penser l'existence jusqu'au bout, même le mort dans la mort et dans son espace la résurrection pour y apercevoir dans sa tenue propre l'être cher. Éprouver les séparations comme les partages. Toucher l'autre, être touché par lui, et être habité par le coeur qu'il a donné. Sentir néanmoins l'étreinte de l'union de l'âme et du corps. Travailler, enseigner et écrire à perte de vue, aimer de même. Exister et agir. Garder et protéger la raison, et être ivre d'infini depuis le fond de la finitude. Se défier des significations établies, déjà mortes. Penser désormais le sens qu'il y a, qui est le monde et rien d'autre, au présent, contre toutes les formes de nihilisme.
Telle fut la tâche que se donna le philosophe Jean-Luc Nancy, en grand vivant.
L'ouvrage parcourt son oeuvre grâce à des approches successives et des voies souvent moins empruntées, en les accompagnant de souvenirs et de prolongements, par conséquent non pour en faire une fois de plus l'exégèse, mais pour en reconnaître la concrétude, et pouvoir ainsi, qu'il s'agisse des grandes comme des petites choses, s'il y en a, approcher de ce que être homme, philosophe et penser tout ensemble veulent dire. -
L'espace numérisé : Défis éthiques et politiques d'une métamorphose
Fred Poché
- Kime
- 22 Janvier 2025
- 9782380721607
Du logement constitutif d'un « chez soi » à la rencontre d'autrui au sein de la Cité, nos existences ne cessent de parcourir et d'investir des espaces. Nous y expérimentons, alors, une familiarité apaisante, des manières communes de nous rapporter au monde (culture partagée), des pratiques sociales, ainsi que des expériences de solidarité. Cependant, traversés par des choix idéologiques et politiques, nos espaces de vie se posent aussi comme des terrains de luttes ou de conflits : squats, occupations d'usines, « accueil » des gens du voyage par les municipalités, « gestion » des sans-abri au coeur des villes, désaccords à l'occasion de constructions ou de démolitions de lieux de culte... Dans le même temps, la numérisation du monde bouleverse toutes les dimensions de notre existence. Les corps continuent, certes, de se croiser ou de se rencontrer dans les différents espaces. Mais la possibilité offerte en permanence, par l'intermédiaire du smartphone, de dépasser la présence corporelle dans un lieu pour communiquer avec l'absent constitue une métamorphose sans précédent. Cette nouvelle situation interroge les notions même de présence, d'identité et de socialité. En quel sens la digitalisation de nos vies change-t-elle notre condition spatiale ? Et quelle forme pourrait prendre une politique soucieuse de ces profondes transformations ? Prendre au sérieux les grandes mutations de nos espaces (matériels et virtuels) constitue une voie nécessaire pour penser des formes d'émancipation propres à articuler liberté et production du commun au sein de nos fragiles démocraties.
-
Le cosmos de Walter Benjamin : un communisme du lointain
Frédéric Neyrat
- Kime
- 15 Avril 2022
- 9782380720594
Ce livre propose de relire la philosophie de Walter Benjamin à partir de sa cosmologie. Le cosmos de Benjamin n'est pas un univers ordonné, composé de corps célestes identifiables, mais l'occasion d'une expérience fulgurante : dans l'univers post-copernicien de Benjamin, l'intériorité du désir et l'extériorité des étoiles, le politique et le théologique, le présent et le distant passé se rencontrent sans fusionner. Situant Benjamin dans la tradition philosophique (G. W. Leibniz, K. Marx, F. Hegel) tout en s'appuyant sur des pensées contemporaines (J. Butler, S. Hartmann, M. Löwy), ce livre crée une « correspondance » entre Benjamin et notre actualité. Dans un monde soumis aux replis nationalistes, aux virus destructeurs d'altérité et à l'intrusion technologique, le lointain semble s'évanouir. En prise avec l'histoire la plus récente, celle du New Space et de la Sixième Extinction, de Black Lives Matter et des Communes éphémères, ce livre soutient qu'aucune transformation politique radicale, aucune émancipation, aucun communisme n'est possible, et souhaitable, sans relation avec un lointain - telle l'Étoile du Nord que les esclaves en fuite suivaient dans le ciel nocturne pour les guider vers la liberté.
-
La notion de défaillance est essentielle à l'existence humaine, qui ne pourrait s'apparaître à elle-même si l'excès de son épreuve du réel ne la confrontait à des situations critiques. Ces moments critiques lui confèrent en effet un relief nouveau et exacerbent les mouvements de fond qui la traversent, selon un paradigme qui permet également de comprendre l'écriture poétique ou les formes plastiques. Il s'agit ainsi de penser la défaillance comme une dimension constitutive de l'existence, qui ne peut plus être comprise selon les logiques du projet, de la réussite et du résultat qui saturent nos environnements d'existence.
Un corpus restreint de philosophes - Søren Kierkegaard, Simone Weil, Emmanuel Levinas, Louis Lavelle, Henri Maldiney et Jean-Louis Chrétien - et une poignée d'artistes - Josef Sudek, Jean Bazaine, Jean-Luc Godard - conduisent à faire le constat qu'une faille traverse toute expérience sensible et permettent d'établir que notre être au monde doit être compris à l'aune d'un déséquilibre impossible à résorber. Ces analyses ouvrent sur une philosophie du témoignage, qui implique ce déséquilibre comme sa condition de possibilité. Elles viennent également nourrir l'horizon d'une vie en commun susceptible d'accueillir toutes les singularités humaines et de les articuler à une exigence de justice qui irrigue la pensée utopique. -
Une société de contrôle ? enfermements, surveillance électronique, gestion des risques et gouvernementalité algorithmique
Olivier Razac
- Kime
- 17 Février 2023
- 9782380720921
Nous serions ainsi passés dans une société de contrôle. Un nouveau monde dominé par des technologies nouvelles permettant d'inventer des manières de gouverner et d'être gouverné inédites. Ces changements radicaux impliqueraient un renouvellement total de nos catégories de pensée qui resteraient construites sur des concepts dépassés. La question politique ne serait plus celle de la loi, ni celle de la norme, mais celle de la régulation en temps réel des comportements dans une grande boucle cybernétique de rétroaction. Dit comme cela, la notion de contrôle provenant des philosophies de Deleuze et de Foucault a l'apparence d'un « mythe » politique qu'il serait urgent de déconstruire. Nous proposons ici autre chose. Ne pas céder à la séduction du « plus jamais comme avant », pas non plus à la facilité du « rien de nouveau sous le soleil », mais proposer de mettre le concept de contrôle au travail, au service d'une « analytique critique de la politique ». À partir d'une distinction conceptuelle de trois technologies politiques - la souveraineté, la discipline et le contrôle - nous montrerons comment elles s'articulent toujours dans des dispositifs de pouvoir concrets : d'enfermement, de surveillance électronique, de gestion des risques criminels et de gouvernementalité algorithmique. Dans ces configurations, notre problème n'est donc pas d'être gouvernés « au contrôle », mais d'être à la fois punis, normés et régulés. Éclectisme qui dessine un régime de domination proprement postmoderne caractérisé par la saturation et les injonctions contradictoires entre nouvelles et anciennes manières de gouverner.
-
Dans une lettre de 1987, Maurice Blanchot revient dans un post-scriptum essentiel sur son rapport à l'oeuvre du philosophe : « Grâce à Emmanuel Levinas, sans qui, dès 1927 ou 1928, je n'aurais pu commencer à entendre Sein und Zeit, c'est un véritable choc intellectuel que la lecture de ce livre provoqua en moi. Un événement de première grandeur venait de se produire : impossible de l'atténuer, même aujourd'hui, même dans mon souvenir »1 . Ce choc intellectuel se produit quelques années avant le commencement de l'oeuvre critique de Blanchot et demeure en sa force jusqu'à la fin. Si, du vivant de l'auteur, le lecteur avait pu voir le nom de Heidegger réapparaître dans bien des articles, ce qui lui permettait de savoir cet intérêt, c'est seulement la mort de l'auteur qui révéla, dans ses archives, aujourd'hui déposées à la Houghton Library de Harvard, plus trois cent pages pour l'essentiel tapuscrites du travail que Blanchot aura consacré de la fin des années 40 au début des années 60 à l'étude de l'oeuvre de Heidegger et de la maigre bibliographie secondaire alors existante.
Excellent germaniste, Blanchot lit tout ce qui paraît en allemand, et se confronte à la difficulté de faire passer en français le travail de Heidegger sur la langue allemande, une lettre inédite de 1959 à un destinataire inconnu révélant que c'est là, à ses yeux, « l'amitié intellectuelle » que nous devons au philosophe. -
L'originalité parfois surprenante et les qualités créatrices d'Oscar Wilde en tant que poète, romancier, dramaturge, sont à juste titre largement reconnues : mais il n'en est pas forcément de même quant à ses réflexions et à ses prises de position dans les domaines de la philosophie, de la morale, de la vie sociale et politique, réflexions pourtant bien repérables dans l'ensemble de son oeuvre, même si L'Âme de l'homme sous le socialisme reste le texte de référence. Pourquoi ce moindre intérêt ? Parce qu'il a violemment dénoncé la société victorienne, parce qu'il a entrepris cette « extravagante croisade celtique contre la stupidité anglo-saxonne », selon le mot de Yeats : et surtout parce que son attitude critique le conduit à affirmer que les temps doivent changer. En effet, le moment semble venu de construire une société nouvelle qui permettra à chacune et à chacun de s'épanouir pleinement, plein épanouissement qu'Oscar Wilde appelle « l'individualisme véritable » : point de vue perspicace et audacieux fondé sur la reconnaissance, dans le prolongement de la pensée de Marx, de l'existence d'un lien constitutif entre individualisme et socialisme.
-
Rosa Luxemburg et Antonio Gramsci actuels
Marie-claire Caloz-tschopp
- Kime
- 19 Avril 2018
- 9782841748907
-
Les cosmologies brisées : essai sur l'écologie cosmopolitique
Valentin Husson
- Kime
- Bifurcations
- 17 Mai 2024
- 9782380721454
Chez les Grecs, le monde fut pensé comme kosmos ; chez les Latins, comme une nature soumise à des lois ; chez les Médiévaux, comme un orbe crucigère ; chez les Modernes, comme une harmonie. A chacune de ces représentations du monde correspondait une hégémonie politique : la démocratie, la République, la Monarchie, l'Etat libéral. Aujourd'hui, ces cosmologies sont brisées ; leurs politiques aussi. Il nous revient de penser le monde à nouveaux frais depuis son anarchie. Comment concevoir celui-ci à l'heure de la mondialisation de l'immonde, de la postvérité et de l'injustice climatique ? C'est à cette question que Valentin Husson tente de répondre dans cet essai érudit et passionnant, en soutenant que l'écologie est ce qui a pour charge de restituer à chaque vivant sa place pour préserver l'harmonie du monde. Chaosmondial, réponse cosmopolitique. La beauté, la vérité et la justice ne sont pas des concepts métaphysiques, mais écologiques. Ce livre se propose de donner sens à la mystérieuse phrase de Dostoïevski : « la beauté sauvera le monde ».
-
L'idée qui a donné naissance à ce livre était d'écrire non seulement une biographie la plus complète possible de l'auteur des Pensées mais aussi de présenter en contrepoint l'ensemble de ses oeuvres, quelle qu'en soit la nature (scientifique, philosophique, mystique...). Sur les pas de Blaise Pascal entend ainsi combler un manque car s'il pouvait exister des biographies de ce dernier, au demeurant peu nombreuses et souvent lacunaires, ou des présentations de ses oeuvres, il n'existait pas de livre qui réunissait les deux. Ce livre s'attache à répondre à deux exigences : d'une part, être le plus rigoureux possible dans la présentation chronologique de la vie de Pascal et de ses différents écrits en s'appuyant sur les sources les plus sûres ; d'autre part conférer à cette présentation le caractère d'une narration littéraire. Science et lettres unies pour donner vie à la vie de Pascal. Éviter le romanesque, les affirmations erronées qui n'ont d'autre but que donner de l'auteur l'image que l'on voudrait qu'il eût, mais éviter aussi la reconstitution d'une vie de manière froide, accumulant des dates sans laisser vibrer le vécu intérieur. L'histoire de Blaise Pascal, comme l'histoire de ses écrits, s'inscrit dans celle de sa famille, de son milieu et du Grand Siècle. Peindre la vie de l'auteur des Pensées, c'est ainsi faire apparaître les événements de son temps qui en constituent l'arrière-plan. C'est aussi cheminer près de tous les lieux où il a séjourné, depuis la rue des Gras à Clermont-Ferrand jusqu'à ses différentes habitations parisiennes en passant par la ville de Rouen, emprunter les pentes du puy de Dôme ou revenir à la tour Saint-Jacques, s'imprégner de l'espace et du temps où il a vécu. En allant sur les pas de Blaise Pascal, le lecteur peut découvrir une vie d'une remarquable exigence et d'une vraie grandeur, centrée sur la vérité et l'amour qu'il mettait au-dessus de tout.
-
L'immense Système de politique (1851-1854) de plus de 2000 pages en 4 volumes est moins connu que la philosophie des sciences du fondateur du positivisme. Celle-ci n'a été qu'un préalable au questionnement que le philosophe a initié dans sa jeunesse : quelle politique pour l'âge de la science et de la révolution industrielle ? N'y a-t-il pas changement dans la nature du pouvoir ? Convient-il de mettre les savants et les ingénieurs à la tête de la société ? Que retenir de la philosophie politique ancienne et moderne, d'Aristote à Hobbes ? Comment terminer, c'est-à-dire à la fois accomplir et clore la Révolution française ?
La philosophie politique comtienne est résolument novatrice : séparation des pouvoirs spirituel et temporel, place de la morale, dépérissement de l'État, rôle des prolétaires et des femmes dans la vie politique.
Une postface fera le tableau des postérités contrastées de cette philosophie politique. En effet s'en réclament les éducateurs laïques de la IIIe République (Littré, Ferry), l'ultra droite maurrassienne, les États d'Amérique latine au XIXe siècle, en particulier le Brésil (qui a mis sur son drapeau la devise de Comte, Ordre et progrès), le radicalisme philosophique (Alain) et le républicanisme français en général. -
Les images profondes. De la photographie : Walker Evans et Baudelaire
André Hirt
- Kime
- 20 Août 2020
- 9782841749690
Il est très étonnant, voire étrange, que le poème s'excède dans l'image. Pour le poète Baudelaire, rien d'original à cela puisque la peinture de Delacroix comme l'image musicale de Wagner, ainsi qu'elle est décrite dans la fameuse lettre admirative au musicien, effectuent ce devenir et cette effectuation poétiques. Mais que le poème se déplace à ce point, qu'il s'élargisse et s'approfondisse dans sa substance, qu'il passe par sa négativité, par conséquent par la matérialité et par la technique (« l'industrie »), pour non pas se retrouver, mais se trouver, c'est-à-dire se reconnaître comme il ne s'est jamais expérimenté, voilà la puissance de l'art photographique.
Car une seule question nous intéresse ici : comment le poème nouveau que Baudelaire élabore dans les temps nouveaux du capitalisme se résout-il, devient-il et se fixe-t-il dans l'image photographique ? Mieux : comme image photographique. Ce n'est pas que le poème s'abandonne, c'est qu'il prend cette forme-là. Et de son côté, l'image photographique ne cesse, aujourd'hui encore et toujours, de s'extraire en quelque sorte comme ce poème-là. On espère le constater par une reformulation des raisons du poème baudelairien afin de pouvoir, ensuite, plonger le regard au fond des images photographiques de Walker Evans qui les accomplissent dans l'Histoire et notre présent. -
Lumières arabes et lumières modernes ; au miroir de l'utopie insulaire d'Ibn Tufayl, expérience de soi et dissidence médiévale
Eric Marion
- Kime
- 9 Février 2016
- 9782841747382
Le présent essai se propose de montrer, en prenant pour fil directeur l'expérience de soi dans l'allégorie philosophique d'Ibn Tufayl, Hayy lbn Yaqzân, que la philosophie arabe, du IXe siècle au XIIe siècle, forme une tradition de pensée vivante et unifiée, trop souvent négligée, s'inscrivant pleinement dans le destin de la métaphysique occidentale et permettant de ressaisir une époque distincte de l'être, qui n'a pas été jusque-là considérée comme telle.
D'autre part et inséparablement, il s'agira d'établir que cette tradition philosophique des Lumières médiévales arabes est à la source des Lumières modernes, tout en se distinguant radicalement de celles-ci, et que cet héritage est resté jusqu'alors insuffisamment pensé. La diffusion effective de cette oeuvre charnière au XVIIe en Europe, et l'expérience décisive qu'elle propose, le confirme : Yaqzàn est bien ce philosophe autodidacte qui pense soi-même, sinon par soi-même. Nous espérons ainsi contribuer à ce que Christian Jambet appelle de ses voeux :
« l'étude des philosophes 'arabes' serait à faire dans le cadre de l'histoire de la raison, qui est l'histoire de la raison occidentale ».
Enfin, mettre en évidence ce rapport entre la falsafa d'un côté, elle-même étant étroitement liée à la révélation coranique, et d'un autre côté ce qui est proprement moderne, pourrait aider à dissoudre bien des préjugés concernant l'lslam. Comme le soutient P.
Mégarbané dans ses ouvrages sur deux immenses poètes arabo-musulmans, Al Mutanabbî et Al Ma'arrî : « depuis deux siècles, on discute de savoir si l'islam est compatible avec la modernité.
Le verdict de l'époque voudrait que le monde arabo-musulman n'ait de choix qu'entre une modernité étrangère à sa tradition et une fidélité ombrageuse à son archaïsme. La réalité pourrait s'avérer bien différente ». L'étude de la philosophie arabe, non moins que celle de la poésie arabe, nous semble être en mesure de confirmer ce jugement salvateur.
Ces motifs et ces raisons nous conduisent à cet essai : esquisser, tenter de proposer une définition des Lumières arabes, définition dont l'élaboration suppose conjointement une élucidation de l'économie de la présence à laquelle elles appartiennent.